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Le CPH de Grenoble écarte l’application du barème des indemnités de licenciement abusif

Publié le : 01/02/2019 01 février févr. 02 2019

L’article 10 de la convention 158 dispose que si les tribunaux arrivent à la conclusion que le licenciement est injustifié et si, compte tenu de la législation et de la pratique nationale, ils n’ont pas le pouvoir ou n’estiment pas possible dans les circonstances d’annuler le licenciement et/ou d’ordonner ou de proposer la réintégration du travailleur, ils devront être habilités à ordonner le versement d’une indemnité adéquate ou toute autre forme de réparation considérée comme appropriée.
L’article 24 de la Charte sociale européenne a repris ce même principe. 
Selon le Comité européen des droits sociaux « les mécanismes d’indemnisation sont réputés appropriés lorsqu’ils prévoient : […] des indemnités d’un montant suffisamment élevé pour dissuader l’employeur et pour compenser le préjudice subi par la victime ».
Tout plafonnement conduisant à ce que les indemnités octroyées ne soient pas en rapport avec le préjudice subi et/ou ne soient pas suffisamment dissuasives est donc, en principe, contraire à la Charte.
La Charte sociale européenne et l’interprétation qu’en fait le CEDS sont d’application directe en droit interne français et doivent faire prévaloir la nécessité d’une indemnisation intégrale des préjudices subis par le salarié.
En l’espèce, selon ce barème le salarié ne pourrait percevoir au maximum à titre de dommages et intérêts que deux mois de salaire, ce qui n’est pas adapté à la situation de l’intéressé licencié sans le respect d’aucune procédure de licenciement et sans visite médicale de reprise suite à son accident du travail.
En outre, ce barème ne permet pas au Conseil d’apprécier à sa juste valeur le préjudice subi par l’intéressé en se limitant au seul critère de son ancienneté. A l’égard des anciennetés les plus faibles, il ne permet pas au juge de tenir compte de l’ensemble des éléments de situation du salarié qui alimentent ses préjudices financiers, professionnels et moraux. En réduisant l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse par des plafonds trop bas, c’est la sanction de la violation de la loi qui perd son effet dissuasif à l’égard des employeurs qui peuvent budgéter leur faute.
Ce barème décourage les salariés d’agir en justice pour faire valoir leur droits et peut même être incitatif à prononcer des licenciements injustifiés, s’ils ont été provisionnés, ce qui est manifestement à l’opposé de l’objectif de dissuasion mis en avant par le CEDS.
Enfin, le droit au procès équitable protégé par la Convention européenne des droits de l’Homme, n’est plus garanti lorsque le pouvoir du juge se retrouve ainsi drastiquement limité. Le barème ne permet plus au juge de moduler l’appréciation des préjudices du salarié en fonction des différents paramètres de sa situation.
 

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