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L'arrêt à ne pas manquer | Protection de la vie privée des salariés et droit à la preuve

Publié le : 30/03/2023 30 mars mars 03 2023

Vidéosurveillance et information préalable des salariés

La mise en place d’un système de vidéosurveillance dans les locaux de travail suppose, en application du RGPD et de la loi dite "informatique et libertés" du 6 janvier 1978, le respect d’un certain nombre de formalités parmi lesquelles une information préalable des salariés concernés (sur la finalité du traitement, la durée de conservation des images, etc). Au cas d’espèce, la salariée licenciée n’avait été informée ni des finalités du dispositif de surveillance, ni de la base juridique qui justifiait sa mise en place ; les juges d’appel avaient de ce fait considéré que les enregistrements extraits de la vidéosurveillance, produits en justice par l’employeur, constituaient un mode de preuve illicite et qu’ils ne permettaient donc pas de démontrer la réalité des faits reprochés à la salariée. La Cour de cassation confirme cette analyse. Est-ce à dire que tout mode de preuve illicite au regard des dispositions relatives à la protection des données à caractère personnel doit nécessairement être écarté par le juge ? La Cour de cassation répond par la négative.

Un élément de preuve indispensable ? 

L’illicéité d’un moyen de preuve fourni par l’entreprise – tel que des extraits d’un dispositif de vidéosurveillance ne respectant pas les préconisations de la CNIL - n’entraîne pas nécessairement son rejet des débats judiciaires. La Cour de cassation l’avait déjà admis en 2020 et 2021 (Cass. soc., 25 novembre 2020, n°17-19523 ; Cass. soc., 10 novembre 2021, n°20-12263). Elle précise toutefois, dans plusieurs décisions rendues le 8 mars dernier, qu’il appartient au juge saisi d’une telle difficulté de vérifier 1) s’il existait des raisons concrètes justifiant le recours à la surveillance, 2) si la production des preuves litigieuses était indispensable, c’est-à-dire si l’employeur ne pouvait pas atteindre un résultat identique en fournissant d’autres éléments, plus respectueux de la vie privée du salarié, 3) et, enfin, si l’atteinte portée à la vie personnelle du salarié était proportionnée au but poursuivi. En l’espèce, les juges relèvent que les faits reprochés à la salariée licenciée étaient justifiés, outre par les extraits de vidéosurveillance produits, par un audit ayant mis en évidence les irrégularités dénoncés ; ils en déduisent que la production des enregistrements "illicites" n’était pas indispensable à l’exercice du droit à la preuve de l’employeur, et, qu'elle était ainsi, irrecevable.

Cass, soc., 8 mars 2023, n°21-17802
 

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