Une procédure disciplinaire statutaire irrégulière empêche-t-elle de licencier un salarié protégé ?
Publié le :
12/12/2025
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Un salarié d’EDF a été licencié pour motif disciplinaire, après autorisation accordée par le ministre du travail sur recours hiérarchique. La cour administrative d’appel a infirmé le jugement du tribunal administratif qui avait annulé cette décision, ce qui a conduit le salarié protégé à se pourvoir en cassation devant le Conseil d'Etat. Son pourvoi contestait la légalité de l’autorisation ministérielle, en invoquant une irrégularité dans la mise en œuvre de la procédure spéciale prévue par le statut national du personnel des industries électriques et gazières selon lesquelles, pour toute sanction autre que l’avertissement ou le blâme, la consultation d’une instance disciplinaire. En l’espèce, la procédure était entachée d’une irrégularité parce que sa lettre de convocation devant le conseil de discipline ne mentionne ni le lieu où la séance du conseil doit se dérouler ni les modalités de son audition par le rapporteur.
Les juges du fond avaient considéré que ce grief de procédure était opérant. La cour administrative d’appel infirme car :
– le lieu de la séance du conseil de discipline est mentionné dans le courrier de convocation envoyé 3 semaines avant sa réunion ;
– le rapporteur désigné a spontanément pris contact avec le salarié pour l’auditionner.
Elle en déduit alors que le vice de forme invoqué n’a pas privé le salarié d’une garantie ni exercé d’influence sur le sens de la décision prise par le conseil de discipline. Il en résulte que la décision autorisant le licenciement du salarié ne peut pas être remise en question pour ce motif.
Le Conseil d’Etat annule l’arrêt : l’irrégularité procédurale met en cause la légalité interne de la décision administrative. La cour aurait donc dû rechercher si, malgré cette irrégularité, le conseil de discipline avait été mis à même d’émettre un avis en toute connaissance de cause, dans des conditions qui ne sont pas susceptibles d’avoir faussé sa consultation.
Le Conseil d’Etat, réglant l’affaire au fond après annulation de l’arrêt de la cour administrative d’appel, a considéré que l’autorisation de licenciement était illégale au motif que la demande de l’employeur, qui avait traité le salarié protégé de façon discriminatoire par rapport à ses collègues, présentait un lien avec l’exercice de ses mandats syndicaux.
Par ailleurs, le Conseil d’Etat tranche la question de savoir si les dispositions du dernier alinéa de l’article L. 1235-2 du Code du travail ont ou non un impact sur l’appréciation des vices affectant la procédure de licenciement d’un salarié, qu’il soit ou non protégé. Pour la Haute cour administrative ces dispositions, aux termes desquelles " Lorsqu'une irrégularité a été commise au cours de la procédure, notamment si le licenciement d'un salarié intervient (...) sans que la procédure conventionnelle ou statutaire de consultation préalable au licenciement ait été respectée, mais pour une cause réelle et sérieuse, le juge accorde au salarié, à la charge de l'employeur, une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire ", sont sans incidence sur le contrôle que doit exercer l’administration sur la régularité de la procédure de licenciement d’un salarié protégé. Ces dispositions ne portent pas sur les demandes d'autorisation de licenciement des salariés protégés.
CE 7 novembre 2025 n° 491700
