L'arrêt à ne pas manquer | Droit d’accès aux données personnelles prévu par le règlement RGPD
Publié le :
19/06/2025
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Faits et termes du litige
Dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt du 18 juin 2025, un employeur avait licencié un salarié pour faute grave à la suite d’une enquête interne diligentée en raison de plaintes relatives à des faits constitutifs de harcèlement moral et sexuel (les courriels envoyés et reçus grâce à sa messagerie électronique professionnelle). Afin d'obtenir la communication par l’employeur d’une copie des courriels qu'il jugeait nécessaires pour défendre ses droits, le salarié invoquait le droit d’accès aux données à caractères personnel prévu par le RGPD. L’employeur s'était opposé à cette demande au motif que le droit d’accès aux données à caractère personnel n’est pas prévu par le RGPD à des fins probatoires.Apport de l’arrêt
Pour la première fois, la chambre sociale de la Cour de cassation se prononce sur la question de savoir si le droit d’accès prévu par le RGPD peut être invoqué pour fonder une demande de communication de pièces contenant des données à caractère personnel du salarié. Elle affirme qu’il résulte des dispositions de ce règlement, d'une part, que les courriels émis ou reçus par le salarié grâce à sa messagerie électronique professionnelle sont des données à caractère personnel au sens du RGPD et, d'autre part, que le salarié a le droit d'accéder à ces courriels, l'employeur devant lui fournir tant les métadonnées (horodatage, destinataires ) que leur contenu, à moins que les éléments dont la communication est demandée soient de nature à porter atteinte aux droits et libertés d'autrui. Faute pour l’employeur de communiquer les éléments demandés, il s'expose à payer au salarié des dommages-intérêts pour préjudice distinct lié au non-respect du droit d'accès, nonobstant son éventuelle condamnation à verser d’autres sommes relatives à la conclusion, l’exécution et la rupture du contrat de travail.Portée pratique
Des salariés licenciés n’ayant pu ou eu l’idée de copier les courriels envoyés ou reçus grâce à leur messagerie électronique professionnelle risquent désormais de faire état de cette évolution jurisprudentielle pour réclamer une copie de ces courriels avant d’agir au fond pour contester les conditions de conclusion, d’exécution ou de rupture de leur contrat de travail. Cette décision présente toutefois deux limites. Tout d’abord, l’arrêt ne concerne que les courriels envoyés ou reçus grâce à la messagerie électronique professionnelle du salarié demandeur. L’arrêt n’envisage pas la communication d’autres courriels contenant ses données personnelles, échangés par d’autres salariés de l’employeur grâce à leur messagerie électronique professionnelle. En outre, l’attendu de principe exclut expressément la communication d’éléments de nature à porter atteinte aux droits et libertés d'autrui. Il conviendra donc de déterminer, courriel par courriel, si les éléments contenus dans les courriels du salarié sont susceptibles ou non de porter atteinte aux droits et libertés des autres salariés, des clients et des prestataires de l’employeur. Cette analyse doit être menée de manière d’autant plus prudente que les tiers pourraient tenter d’engager la responsabilité de l’employeur en cas de communication au salarié demandeur de courriels portant atteinte aux droits et libertés de ces tiers.Cass. soc., 18 juin 2025, n°23-19022